BIOGRAPHIE
Peindre me
permet de forcer l’imagination, de provoquer un ressenti de
plaisir ou de
provoquer la colère, mais je pense, jamais
d’indifférence. Elle me permet de
jeter un pont entre le dehors et le dedans, entre ce que l’on
voit et ce que l’on
ne voit pas. Tout me semble donc bon pour parvenir à la
sensation, pour
débloquer les sens qui n’ont apparemment rien
à faire avec l’observation :
voir et regarder.
J’ai
un besoin
de réaliser la plus surprenante des
synthèses ; celle de la
réalité et du
rêve. Mon premier souci n’est donc pas de faire
beau, mais de faire si possible
vrai. Si la vérité éclate, le beau se
manifeste alors aussi bien à travers le
choquant, l’inattendu, l’irritant,
l’insolite ou le délirant. La raison nous
emprisonne bien souvent. Pour accéder à
l’irrationnel, il faut un choc. Un
tableau ou une sculpture peut le provoquer et ainsi jouer le
rôle de catalyseur
pour nous permettre d’accéder à la
liberté.
Si celui
qui
regarde mes peintures ou mes sculptures veut bien abandonner ses
préjugés et
ses positions arrêtées, il pourra entrer dans
l’intimité des œuvres qui selon
la définition célèbre de
René HUYGHE est : « le
plus court
chemin d’un homme à un autre »
Mon premier maître
en peinture fut le
professeur Philippe Steinmetz au lycée Kléber
à Strasbourg. Pendant quatre
années, j’ai suivi ses cours avec
assiduité. Découvrant rapidement mes
dispositions pour le dessin, il me proposait de rester après
la classe pour
m’initier à la composition de natures mortes. Il
me
disait : « ne copie pas les pommes
que tu as devant toi, mais
crée tes pommes ; ne peins pas ce que tu vois, mais
ce que tu
ressens » Je voulais bien faire, mais je sentais
déjà le poids de la
culture et des normes établies. Les jeudis après
midi, il avait la gentillesse de
m’emmener avec lui pour peindre dans la
nature. « Elle te donne tout,
me disait-il, apprend à la saisir, regarde-la avec les yeux
de ton cœur »
Je
m’étais
alors inscrit aux cours du soir aux Arts-Déco, où
durant quatre années, j’ai
suivi l’enseignement du professeur Huebert qui sut me faire
découvrir le juste
trait, le bon mouvement, la magie des couleurs, l’observation
des formes et des
volumes tout en me laissant toute liberté
d’exécution. L’art moderne me
fascinait tout en me faisant très peur.
Depuis
cette
époque, quarante cinq années se sont
écoulées. Je ne suis pas devenu peintre,
mais médecin, une autre façon de flirter avec
l’art, et lorsque j’ai pris ma
"retraite" je compris que tout
le temps passé à l’écoute de
mes
patients fut une période indispensable à la
maturation de mon expression
picturale et à la mise en place d’une
réflexion sur l’art, celui que je porte
en moi
Mon
inspiration tire sa substance de ma vie de médecin et de
grand voyageur. Formé
initialement à la chirurgie gynécologique et
à l’obstétrique, j’ai
finalement
opté pour la médecine
générale. Une formation en psychologie et en
sophrologie
est venue complétée mon cursus et m’a
ouvert à la thérapie
d’écoute. Curieux de
l’humain, je le suis aussi de la terre. Mes nombreux voyages
m’ont conduit un
peu partout dans le monde. Mon appareil photos ainsi que ma
caméra m’ont
toujours accompagné, et m’ont permis
d’engranger une quantité de documents, une
mine que je continue d’enrichir et d’exploiter.
Mes
peintures
ne proposent pas des choses mais des signes, des formes et des couleurs
qui
disent comment faire un univers qui tient la route. Je pensais
à tort qu’une
peinture tenait sa réalité de
l’imagination. En fait, les formes et les
couleurs font naître des images lorsque nous en
rêvons, mais quand nous
regardons, nous ne rêvons pas, nous décryptons et
nous essayons de pénétrer le
sens caché. Face à une toile, nous sommes dans
l’attente que quelque chose se
passe, car un tableau à première vue pourrait
ressembler à une toile enduite de
peinture, alors qu’en fait il s’agit de grandes
"Formes en Déplacement"
imperceptible.
Ce "Déplacement", j’essaye de
l’intercepter, de le guider et de
l’infléchir
pour en faire la substance de mes toiles. Les symboles sous jacents
gonflent et
se nourrissent alors avec le temps de l’observation. Mais
pour que la durée
s’installe, il me faut retenir le spectateur.
J’esquisse au moyen de formes et
de couleurs connues de celui qui regarde, un avenir qui n’est
pas encore
réalisé. Ce qu’il ressent
n’est alors pas ce qu’il voit, mais son propre
déplacement intérieur,
l’émergence de l’inconnu, de ce
qu’il n’attendait pas,
l’imprévisible qui finit par nourrir son discours
intérieur. Celui qui regarde
est libre, libre de porter son regard vers
l’extérieur, ou bien de se laisser
saisir par ce qui se présente en lui, en éprouver
du plaisir, un malaise, voir
de la peur. Dans tous les cas, il sera obligé de constater
qu’il a ressenti
quelque chose.
Je
considère
que l’art est un processus vivant comme
l’humain ; on ne peut pas le
disséquer sans risquer de le tuer. L’art, je le
conçois comme un organisme et
non pas comme un système. Je considère mes
œuvres comme une création analogue
aux rêves et aux mythes par laquelle l’inconscient
exprime, en le déguisant,
les complexes refoulés par la conscience claire. La
vraisemblance n’a pas
d’importance. Tout, pour moi, doit concourir à la
vérité, aux nécessités
d’une
nature supérieure qu’on suppose sans la
découvrir. Le but inconsciemment
recherché en désagrégeant
l’objet, en l’absorbant, est de le
dépasser ;
lui et son support, la Toile.
Pour
« faire passer » ou
pour « projeter » ce que
je vois
en moi, je fais appel à ce que je pratiquais en
médecine. Après avoir examiné,
ausculté, palpé, je
m’efforçais non pas d’abord de soigner
tel ou tel organe ou
tel viscère, mais de découvrir pourquoi tel
organe ou viscère était malade.
Après l’observation du corps, je
m’obligeais à responsabiliser mon patient afin
de le faire participer à sa guérison. En
éveillant un petit complément
d’âme
indispensable pour exister, je l’entendais souvent dire en
sortant de mon
cabinet : « vous venez juste de
diagnostiquer mon mal, et déjà
je me sens mieux » Le sujet, sans le savoir, venait
simplement de se
réconcilier avec lui-même.
Mon
propos, à
travers mes recherches en peinture, est d’inviter le
spectateur à pénétrer dans
les profondeurs de son être, grâce aux formes et
aux couleurs, jusqu’à l’Âme,
ce principe vital qui fait plus que de relier une portion de
matière et un
souffle d’esprit, il les unit dans un même sujet.
Dans mon livre « La
Sagesse du Corps » je me suis efforcé de
démontrer comment en redonnant au
corps ses capacités d’autodéfense, il
nous été permis de vivre mieux. Ici à
propos de mes tableaux et de mes sculptures, j’invite le
spectateur à prendre
conscience de l’influence de l’esprit sur le corps,
à se rapprocher de Soi
jusqu’au lieu où
« souffle » l’esprit.
Ma peinture aura été un
prétexte ou un encouragement à parcourir ce
chemin. Et comme disait très justement
Paul Valéry : « Ce que
nous appelons une œuvre d’art est le
résultat d’une action dont le but FINI est de
provoquer chez quelqu’un des
développements INFINIS
Livres
publiés : « Sophrologie et
Maternité »
Une Nouvelle Espérance
( Ėdi. Signal )
1990
« La
Sagesse de Corps » (Édi.Randin
) 2000
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